Le cycle du phosphore par Hervé COVES, pour une agriculture durable.

Dans cet article vous pourrez lire un résumé écrit des analyses offertes pas l’ingénieur agronome Hervé COVES dans la vidéo Youtube en lien.

Est abordé le rôle crucial de la vie dans le cycle du phosphore; et comment la compréhension des champignons permet d’améliorer les pratiques agricoles et de passer sereinement la crise du phosphore qui attend l’agriculture dominante dans le siècle à venir.

Tiré de la vidéo mise en ligne par Steve READ de l’Université Populaire de Permaculture.
Lors d’une formation de 2013 où j’avais eu la chance d’être présent.

Vidéo Youtube Hervé Coves et le cycle du phosphore.

Qu’est-ce que les plantes « mangent » ?

De l’eau, de la lumière, des oligo-éléments, des sels minéraux, de l’O², du CO²… et du phosphore.

Dans tous les êtres vivants, il y a un rapport constant entre l’azote et le phosphore. Pour chaque organisme on a 16 fois plus d’azote que de phosphore. L’azote lui se trouve facilement, au contraire du phosphore, qui n’est pas réparti de manière homogène sur la planète. Il existe quelques gisements, des phosphatières, comme au Maroc ou dans le Lot… Les phosphatières sont souvent des gisements fossiles d’anciens ossements accumulés au fond des mers, il n’existe quasiment pas de roches qui contiennent du phosphore. Ce dernier est pourtant très important car c’est un facteur limitant à la vie.

Ce phosphore est si rare, la nature a donc mise en place des mécanismes essentielles pour le rendre disponible. C’est ce que voulait découvrir l’Union Soviétique, en nourrissant une souris avec du phosphore radioactif :

  • Une fois la souris morte, elle fut disposée sur un sol fertile avec présence d’arbres et de mycorhizes.
  • Le processus de décomposition se met en place. Les mouches pondent. Des petits scarabées s’accaparent la charogne et l’enterrent…
  • Au bout de 3 jours, il n’y a plus du tout de viande, il ne reste plus que les os. A ce moment-là, les hyphes d’un champignon viennent coloniser le squelette, riche en phosphore, une mine d’or !
  • Ayant ses ossements devenu radioactifs, cela a permis de tracer radioactivement le phosphore dans l’environnement.
  • Le champignon se développe, le phosphore radioactif se diffuse dans celui-ci.
  • Peu de temps après, du phosphore est tracé dans un champignon voisin. Les champignons ont un appareil digestif en commun, ils peuvent s’interconnecter entre eux. Certains sont mycorhiziens, ils vivent en symbiose avec des plantes; cette symbiose permet notamment l’échange de glucides provenant de l’arbre contre de l’eau et du phosphore du champignon !
  • Le phosphore radioactif transite chaque heure d’avantage via la toile d’araignée souterraine, formée par les racines des arbres et les hyphes de champignons. Un champignon capte, il donne à un arbre, ce dernier redistribue à ses racines, sur lesquelles il y a d’autres hyphes de champignons, qui redistribuent à leurs tours… un système d’échange et d’entraide.
  • Au 10ème jour, il n’y a plus de phosphore dans le cadavre de la souris, il est réparti équitablement dans la vie sur plus de 1000m² ! Prodigieux… !!!

Des stratégies de coopération se sont mises en place pour optimiser des ressources excessivement rares.

Actuellement, le modèle agricole dominant est devenu dépendant du phosphore. Il en épand tous les ans des quantités phénoménales qui se bloquent rapidement dans le sol, devenant inassimilables. Ayant détruit la symbiose que les plantes ont avec les champignons, le système est devenu dépendant des intrants et n’a plus de résilience naturelle. Avec l’agriculture conventionnelle, à ce rythme, d’ici 100/150 ans les gisements de phosphore seront épuisés, l’agriculture telle qu’elle est développée ne pourra subsister.

Un grand nombre de phosphore se perd également dans la mer. Se retrouvant dans certaines fosses marines ou encore en transit via les courants océaniques. A un moment particulier dans le cycle du phosphore, il arrive dans les zones polaires.

Vers le pôle Nord, grâce aux courants, il y a un grand nombre d’éléments minéraux présents dans l’eau, dont le phosphore. Il manque cependant un élément essentiel à l’émergence de la vie, l’azote. Ce dernier arrive également sur la scène grâce aux aurores boréales qui apportent 25% du nitrate terrestre. Ces rayons cosmiques, chargés, arrivent sur terre et interagissent avec l’azote et l’oxygène atmosphérique créant des nitrites et des nitrates. Tout ceci s’accumule donc dans les pôles, provoquant à la belle saison, avec le retour du soleil, une explosion de vie. Un processus singulier se met en place. Le krill prolifère, se gorgeant de phosphore, les baleines, les oiseaux… mangent le krill… Le cycle du phosphore se relance dans une nouvelle migration via la vie, pour redescendre vers l’équateur. Tous les animaux migrateurs qui se nourrissent ici, tous les poissons qui vont repartir, dans ce lot, certains vont mourir en route et/ou se faire manger par d’autres, redistribuant leur précieux phosphore. C’est un moyen qu’a ‘inventée’ la nature pour disperser le phosphore sur toute la planète.

L’Homme possède trop de phosphore dans ces os, ce qui les rend cassant. Ce trop prendrait peut-être son explication au travers de la mission que porte la vie de transporter le phosphore sur la Terre ?

« La mort c’est quelque part un cadeau que fait la vie à la vie. »

Comment faire pour avoir du phosphore dans son jardin

  • Attirer des animaux pour qu’ils viennent y mourir, ou tout simplement vivre.
  • Faire fourmiller la vie : plus il y a de vie, plus il y a de phosphore en circulation et utilisable.
  • Recevoir les fientes d’oiseaux  riches en phosphore.
  • Entraver le moins possible les cycles migratoires (zones humides, passes à poissons…).
  • Remobiliser les champignons en laissant de la matière carbonée (bois) sur le sol et en ne le retournant pas pour ne pas détruire le réseau mycélien.
  • Mettre des plantes de la famille des Liliacées qui se mettent en symbiose avec les champignons utiles Glomus / Glomeromycetes.

Finalement la crise du phosphore n’est que passagère si nous changeons notre regard et notre façon d’agir !

Hervé Coves

Merci à Teddy PISSON LAHONDA d’offrir à la communauté Permafutur cette retranscription qu’il a fait suite aux visionnages de la vidéo d’Hervé.

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